Entretien avec Marion Guillou (X 1973), Grande donatrice de la Fondation

Ancienne élève de l’École polytechnique, Marion Guillou est spécialiste de la sécurité alimentaire mondiale et membre du Haut Conseil pour le Climat depuis 2018. Après avoir été l’une des premières femmes à intégrer l’X, elle a été la première femme à la présider. Aujourd’hui encore, elle soutient son Alma Mater en tant que Grande donatrice.
Entretien avec Marion Guillou (X 1973), Grande donatrice de la Fondation Marion Guillou (X 1973)
20 juin. 2022
Portrait

Vous êtes diplômée de la promotion 1973 et faites partie des premières femmes à avoir intégré l’École polytechnique. Pourquoi avoir choisi cette voie ?

Je suis provençale et j’ai effectué toutes mes études à Marseille où j’ai préparé différents concours. J’ai été admise à Normale-Sup mais j’ai préféré intégrer l’École polytechnique qui avait ouvert son concours aux femmes un an auparavant. Je ressentais une vraie curiosité pour ces études et je souhaitais participer à cette aventure. Nous étions 12 femmes dans la promotion 1973 et croyez-moi, cela a engendré une vraie et nécessaire solidarité entre nous ! L’X a représenté pour moi une immense chance. L’ouverture aux sciences dans leur diversité, la rencontre de professeurs exceptionnels, l’apprentissage de l’engagement public m’ont fortement marquée.

Pourriez-vous revenir sur les grandes étapes de votre carrière ?

Je suis spécialiste des questions de sécurité alimentaire. Après l’École polytechnique, j’ai intégré le corps du génie rural, des eaux et des forêts, bénéficié de la formation à l’ENGREF, aujourd’hui connue sous le nom d’Agro ParisTech, puis j’ai obtenu un doctorat en physico-chimie des bio-transformations à l’Université de Nantes. J’ai débuté ma carrière au sein d’administrations locales puis dans un laboratoire de recherche. De 1996 à 2000, j’ai été Directrice générale de la Direction générale de l’Alimentation au ministère de l’Agriculture et de l’Alimentation, avant de diriger pendant 12 ans l’Institut national de la recherche agronomique, devenu depuis INRAE. Parallèlement, j’ai retrouvé en 2008 l’École polytechnique dont j’ai présidé le Conseil d’administration jusqu’en 2013. Je suis aujourd’hui engagée auprès du Haut Conseil pour le Climat et auprès d’instances internationales de recherche agronomique.

Votre carrière est placée sous le signe de l’intérêt général et de la résolution des grands défis de notre époque. Qu’est-ce qui a motivé cet engagement ?

Un besoin de comprendre et un désir de participer qui sont, me semble-t-il, partagés par de nombreux jeunes aujourd’hui. Dans le contexte actuel, je pense qu’il est important de tenter de comprendre ce qu’il se passe, tant à l’échelle locale qu’à l’échelle globale, et de voir comment il est possible de contribuer pour faire évoluer les choses positivement. Pour ma part, c’est ce qui a motivé mon choix pour le service public, et plus particulièrement mon action et mon implication sur les sujets de l’alimentation et du climat.

De 2008 à 2013, vous avez présidé le Conseil d’administration de l’École polytechnique et avez même été la première femme à occuper cette fonction. Quelles ont été les réalisations dont vous êtes particulièrement fière ?

J’en citerais deux. La première est que nous avons travaillé sur la diversification des recrutements des élèves avec la volonté d’ouvrir l’X à des profils différents et à l’international, et bien sûr, d’attirer davantage de femmes. La seconde a été l’accent mis sur les sciences et les techniques particulièrement aux interfaces. Ainsi la construction d’un nouveau centre de recherche à l'interface entre la biologie et les sciences de l'ingénierie a été décidée et a été rendue possible grâce à la première Campagne de levée de fonds présidée par Claude Bébéar.

Durant votre mandat, la Fondation de l’X a en effet mené sa première Campagne de levée de fonds qui a permis de collecter plus de 35 millions d’euros. En quoi cette dernière a-t-elle contribué à faire évoluer l’École ?

La Fondation, à travers cette Campagne, a joué un rôle irremplaçable pour l’X qui pâtissait d’un problème d’attractivité. Les fonds collectés ont permis d’attirer et de garder des chercheurs et professeurs internationaux réputés, mais également de financer leurs travaux. Dois-je rappeler que la Fondation a soutenu les recherches sur les lasers menées par Gérard Mourou, lauréat du prix Nobel de physique en 2018 ? Les dons ont aussi fourni une aide précieuse aux élèves étrangers à travers le financement de bourses. Au-delà de l’aspect financier, cette Campagne a permis de rapprocher les Anciens de l’École et donc de pouvoir compter sur une communauté dynamique et active.

Avec votre époux, également diplômé de l’X, vous faites partie des Grands donateurs de la Fondation. Pourquoi est-il important pour vous de rester engagée en faveur de votre Alma Mater ?

Le projet et l’avenir de l’École m’intéressent et je souhaite donc continuer à être solidaire. Donner à la Fondation est aussi une façon de rendre à l’X ce qu’elle m’a apporté.

Les transformations sociales, sociétales ou encore environnementales ne cessent de s’accélérer. Quel rôle doit selon vous jouer l’École face à ces évolutions majeures ?

L’X a été créée pour servir l’État et son statut militaire en est un élément fondateur. Elle forme des ingénieurs, des forces scientifiques et techniques dont l’État, mais aussi les entreprises privées, ont besoin. L’X est utile au pays et je souhaite qu’elle conserve son âme scientifique et son rôle si particulier vis-à-vis de la Nation.

L’X célèbre cette année le cinquantième anniversaire de l’ouverture du concours du Cycle Ingénieur aux femmes. Vous qui avez ouvert la voie, quel message souhaiteriez-vous adresser aux jeunes femmes ?

Allez les filles ! Explorez des domaines peu classiques, même si ceux-ci sont dits « masculins ». N’hésitez pas à prendre des responsabilités. N’hésitez pas à approfondir des disciplines. N’hésitez pas à vous engager.

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