Des mouvements insoupçonnés au cœur des aimants

06 oct. 2020
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Figure extraite de l’article : (a) Relaxation du mouvement de précession d’un dipôle magnétique (c’est-à-dire d’un aimant), (b) mouvement de nutation superposé à la précession.

Un modèle incomplet

Lorsqu’on applique un champ magnétique sur un dipôle magnétique (une boussole par exemple), l’axe du dipôle se met à tourner rapidement autour du champ magnétique, c’est ce qu’on appelle le mouvement de précession de Larmor. Avec un champ magnétique de 1 Tesla, ce mouvement atteint une fréquence de l’ordre de 20 GHz, soit 20 milliards de tours par seconde.

En théorie, si on coupe le champ magnétique, la précession s’arrête alors instantanément. En effet, la description de la cinétique de précession n’inclue pas d’inertie. Or, un dipôle accéléré (ou décéléré) rayonne et perd de l’énergie, et il ne peut donc pas s’arrêter instantanément.

Ce constat montre que la description de la dynamique de l’aimantation semble incomplète, mais jusqu’à récemment, cette problématique n’était pas étudiée car elle ne présentait pas d’intérêt pour les applications, et surtout les technologies de mesures ne permettait pas de sonder des vitesses de rotation bien supérieurs à celle de la précession (c’est-à-dire dans le domaine THz) qui étaient pourtant nécessaires à sa compréhension.

Vers la découverte d’un mouvement supplémentaire

La situation a changé ces dernières années, en particulier par une demande technologique accrue pour augmenter les vitesses de lecture et d’écriture dans les dispositifs de stockage de l’information sous forme magnétique (Magnetic Random Access Memory, ou dispositifs logiques magnétiques) tels que les disques durs des ordinateurs.

Il y a une dizaine d’années, une équipe du Laboratoire des solides irradiés* sous la direction de Jean-Eric Wegrowe, professeur à l’Ecole polytechnique, a développé un modèle prédisant l’effet de l’inertie due à la précession de l’aimantation : l’inertie se manifeste sous la forme d’un mouvement de nutation qui se superpose à la précession, c’est à dire des oscillations de l’axe de rotation (voir figure).

Des observations pour confirmer le phénomène

Ce modèle a été d’abord développé dans le cadre d’une thèse (Bourse Monge de l’École polytechnique) et a été à l’origine d’une quête de dix ans pour arriver à sa mise en évidence expérimentale. Jean-Eric Wegrowe a réussi à mettre sur pied une équipe internationale d’experts, avec la possibilité de travailler sur un gros instrument de puissance, le « Free electron Laser » du Helmoltz centrum à Dresden en Allemagne. Ces efforts ont abouti à une première mise en évidence expérimentale de la résonance de nutation, publiée cette semaine dans la revue Nature Physics.

Cette découverte n’est que le début de la compréhension de ce phénomène qui demandera des mesures complémentaires avec des instruments plus performants, mais elle ouvre la voie à la mise au point de technologies originales pour des dispositifs ultra-rapides de traitement de l'information.

> En savoir plus : lire la publication

*LSI, une unité mixte de recherche CNRS-CEA-École polytechnique

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