Trois chercheurs de l’École Polytechnique lauréats de bourses ERC Advanced

Chaque année, le Conseil européen de la Recherche soutient une recherche de rupture et l’excellence scientifique. En 2024, Charles Baroud, du laboratoire d’hydrodynamique de l’École Polytechnique (LadHyX), Olivier Gossner, du Centre de recherche en économie et statistique (CREST) et Joris van der Hoeven, du laboratoire d’informatique de l’École Polytechnique (LIX), reçoivent chacun une bourse ERC dans la catégorie Advanced Grants. 

MELCART – Ingénierie de microdispositifs souples pour la caractérisation mécanique et la stimulation des microtissus

Tout au long de leur développement et en interagissant avec leur environnement, les êtres vivants soumettent leurs tissus à des contraintes mécaniques plus ou moins longues. Ces dernières ont un impact majeur à de nombreux stades de la vie (développement embryonnaire précoce, régulation et stabilisation des tissus adultes, progression des maladies). La mécanobiologie étudie ces phénomènes et a déjà mis en exergue de nombreux circuits mécanosensibles au sein de la cellule. Mais quid de la réponse de tissus constitués de plusieurs types cellulaires et organisés en structure 3D complexes à ces contraintes ? Le projet Melcart, porté par Charles Baroud, professeur au laboratoire d’hydrodynamique de l’École Polytechnique (LadHyX*), applique la mécanobiologie à des modèles in vitro reproduisant ces structures (sphéroïdes, organoïdes). Le chercheur développe pour cela des microdispositifs innovants intégrant des concepts issus de la science des matériaux architecturés - des matériaux composites aux propriétés mécaniques singulières - et de la robotique molle – dont les robots ont une structure souple - afin de générer un forçage mécanique à l’échelle cellulaire. Les dispositifs élaborés sont alors couplés à une méthode unique de mesure et de caractérisation des cellules (cytomètrie multiéchelle) et à la physique de la matière molle. Ces travaux interdisciplinaires ouvrent un nouveau champ d’étude et de compréhension des phénomènes en jeu dans certaines maladies ou dans la différenciation des cellules souches. Ils contribueront au développement de nouvelles stratégies de caractérisation cellulaire et potentiellement à l’identification de voies mécanosensibles pour traiter les tumeurs cancéreuses.

* LadHyX : une unité mixte de recherche CNRS, École polytechnique - Institut Polytechnique de Paris

SInfoNiA – L'information stratégique : nouvelles orientations et applications

Crises financières, attaques de devises, stabilité sociale…l’activité économique de notre monde est particulièrement sensible à l’information et à la manière dont elle circule. Porté par Olivier Gossner, directeur de recherche au Centre de recherche en économie et statistique (CREST*), le projet SInfoNiA s’appuie sur l’étude des systèmes de décision entre plusieurs acteurs (la théorie des jeux) pour analyser comment la dissémination de l’information impacte les choix collectifs. Le projet utilise à cet effet un modèle original d’information interactive adapté à la théorie des jeux dans lequel les croyances, les opinions, les actualités, etc. (qui constituent l’information) sont représentées par une combinaison d’outils mathématiques probabilistes et algorithmiques. Ces derniers auront pour vocation de créer un langage scientifique pertinent, utilisable par le plus grand nombre. Ils traduiront le poids de croyances, par définition immatérielles, sur des décisions bien réelles. Grâce à son volet ingénierie et à cette méthodologie, SInfoNiA étudiera également l’impact de la circulation de l’information au sein de diverses organisations. Il s’agira d’analyser de nouveaux modèles de stabilité financière, mais également de s’intéresser aux conséquences de certaines données sur la robustesse des équilibres sociaux (jusqu’à quel point une fake new peut-elle déstabiliser la société ?). Enfin, il sera question de comprendre comment l’information et les croyances de chacun peuvent faire évoluer une norme sociale (en matière d’égalité des sexes par exemple).

* CREST : une unité mixte de recherche CNRS, École polytechnique - Institut Polytechnique de Paris, GENES, ENSAE Paris - Institut Polytechnique de Paris

ODELIX - Résoudre les équations différentielles de façon rapide, précise et garantie

Les équations différentielles, c’est-à-dire les équations dont les inconnues sont des fonctions et faisant intervenir les dérivées de ses fonctions, sont un objet de recherche essentiel en mathématiques. Leur utilité s’étend à beaucoup d’autres domaines. Elles permettent en effet de modéliser, entre autres, le mouvement des planètes, la propagation des épidémies, ou encore l’évolution d’une réaction chimique. Il existe différentes approches pour les résoudre, soit de façon exacte (mais ces solutions n’existent pas toujours ou peuvent être difficiles à calculer), soit de façon approchées grâce à des méthodes numériques. Le but du projet ODELIX mené par Joris van der Hoeven au LIX* est d’améliorer la compréhension et la résolution de ces équations. Du point de vue des méthodes numériques, le projet se focalisera notamment sur les cas difficiles à résoudre aujourd’hui de manière rapide et avec une précision garantie. En ce qui concerne les méthodes exactes (analytiques), le projet a pour ambition de réduire la complexité du problème grâce à des techniques issues du calcul formel. Enfin, des outils, comme des bibliothèques de codes, seront développées pour permettre l’utilisation pratique de ces méthodes. 

*LIX : une unité mixte de recherche CNRS, École polytechnique - Institut Polytechnique de Paris